Macron et LREM : le retour du clivage droite-gauche
Premières tensions au sein de La République en marche sur les coupes budgétaires. La gauche du mouvement se réveille. Macron aura-t-il ses frondeurs ?
PAR EMMANUEL BERRETTA
Modifié le - Publié le | Le Point.fr
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Gérald Darmanin est inquiet. Son appréhension du moment ne relève pas de la conjoncture économique (plutôt meilleure) ni des exigences bruxelloises sur les déficits. Sa crainte ? Le groupe LREM. Les tensions récemment apparues chez les députés macronistes à propos de la baisse prochaine des APL lui font craindre que les très sérieuses coupes budgétaires de la loi de finances 2018 ne passent pas comme une lettre à la poste cet automne. Pour le dire en un mot, Darmanin craint qu'une fronde de « gauche » ne se développe au sein des députés LREM. Le ministre cherche des relais pour contenir les iniatives redoutées du groupe à l'automne lors des débats budgétaires.
« Oui, la baisse des APL a créé un gros remue-ménage au sein du groupe parlementaire, confie-t-on de l'intérieur. Il ne faut pas oublier qu'une grande partie des députés LREM vient de la gauche. Ils ont adhéré au macronisme parce que son programme comportait aussi une dimension sociale et humaine. » En somme, le clivage droite-gauche n'est pas mort et se perpétue au sein de La République en marche, un mouvement qui, comme le Parti socialiste, comporte une dominante de gauche et une dominante de droite. De là à voir se reproduire une « fronde » comme sous le quinquennat précédent ? C'est le risque.
Inspiration libérale
Pour l'instant, Emmanuel Macron et son gouvernement ont principalement envoyé des signaux de réformes d'inspiration libérale. D'abord, par le choix des hommes : Édouard Philippe à Matignon, Gérald Darmanin et Bruno Le Maire à Bercy forment une triade puissante provenant des Républicains. Dans leurs cabinets, on retrouve aussi des conseillers qui ont travaillé plus ou moins directement pour... le candidat François Fillon. Il y a là de quoi inquiéter les anciens socialistes qui ont rejoint Macron... « Certes, il y a eu des maladresses dans la communication de la mesure sur les APL, admet François Patriat, sénateur LREM et proche du chef de l'État. À droite, quand on fait des coupes budgétaires, on se montre brutal parce qu'on veut apparaître comme courageux. Ce n'est pas la manière d'Emmanuel Macron qui aurait préféré que l'on présente globalement la réforme du logement. »
Les premières étapes de la présidence Macron sont clairement d'inspiration libérale : les pistes envisagées pour assouplir le marché du travail comme les coupes budgétaires aux collectivités locales et celles qui frapperont l'État (sauf la Défense), les réductions d'impôts, la réforme de l'ISF pourraient très bien émaner d'un gouvernement Fillon. Mais ce serait injuste de ne voir que l'aspect libéral du programme Macron : son action « sociale », elle, se déploie plus lentement à l'international. Elle est moins visible et cependant, elle existe aussi : le président tient absolument à ce que l'Europe parvienne à résoudre le problème de la fraude au travail détaché (en octobre, l'Europe accoucherait d'une proposition de révision de deux textes) et s'arme vis-à-vis du dumping social des pays tiers par la mise en oeuvre de la réciprocité réelle. Le paquet fiscal de l'automne comprendra aussi des mesures pour soutenir les petites retraites (qui ne seront pas concernées par l'augmentation de la CSG), l'aide aux handicapés, le smic, etc.
Bref, ceux qui redoutent la « droitisation » excessive de Macron, sous l'influence de Le Maire ou Philippe, doivent garder à l'esprit la photographie d'ensemble, le fameux « en même temps » que le président ne perd pas de vue même si, dans un premier temps, il cherche surtout à « créer un choc de confiance » vis-à-vis de ceux qui, en France, génèrent de la richesse.
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