Alors que des vidéos de candidats macronistes très hésitants sur les plateaux de télévision circulent sur Internet, plusieurs d'entre eux ont refusé les débats d'entre-deux tours.
«Une sorte d'abaissement et d'affaissement démocratique». Le candidat Les Républicains (LR) Hervé Novelli ne mâche pas ses mots après le refus de son opposante LREM Fabienne Colboc, arrivée en tête (34,39%), de débattre face à lui d'ici au second tour. La confrontation télévisée du premier tour «a dû jouer dans son refus de débattre, car on voyait clairement qu'elle ne maîtrisait pas les dossiers», estime le candidat qui se présente en Indre-et-Loire, «je pense qu'il y a la volonté de ne pas prendre de risques». Une référence à un débat dont des extraits,
diffusés sur Youtube par les détracteurs de la candidate, sont devenus objets de moquerie des réseaux sociaux. Dans cette vidéo militante, on la voit mise en difficulté par une question sur le modèle social français. «Ma force, c'est le terrain (...), c'est pourquoi j'ai refusé l'autre débat», s'est justifiée la candidate auprès de
France Bleu Touraine, après avoir reconnu sur
TV Tours avoir raté le débat.
Des refus en cascade
Même situation dans le Rhône, où la candidate arrivée en première position (32,08%), Anissa Khedher, a décliné l'invitation d'
un média local à battre le fer devant les caméras. «C'est la République en fuite», estime son adversaire LR-UDI Alexandre Vincendet, qui diffuse à l'envi la vidéo du premier débat où la candidate LREM, bafouillante, lit une feuille reprenant les éléments de langage du parti d'Emmanuel Macron et avoue son incompétence à se positionner sur la suppression de la réserve parlementaire. Anissa Khedher a motivé
sur Facebook son choix de boycotter l'échange avec son concurrent: «C'est hélas devenu une habitude, des adversaires colportent des ragots, diffament, cherchent à me calomnier en me qualifiant d'incompétente, en me prétendant inexpérimentée et même soumise (...). Alors oui, je ne peux pas accepter un débat télévisé où je sais d'avance que mes arguments feront place à l'invective, où la diffamation empêchera tout échange comme le laissent très bien imaginer certains documents actuellement diffusés».
Comme Hervé Novelli et Alexandre Vincendet, plusieurs candidats LR se plaignent de ne pas pouvoir débattre avec leur opposant LREM. C'est le cas de Guillaume Larrivé dans l'Yonne, Nicolas Florian en Gironde, Jean-Michel Fourgous dans les Yvelines, Arnaud de Courson à Clichy et Nicolas Dhuicq à Troyes où se déroule la seule triangulaire avec trois candidats présents au second tour. Le FN Jean Messiha, dans l'Aisne, dit faire face à un «candidat fantôme» après que les débats face à lui, à la télévision et dans la presse locale, ont été avortés. Eric Coquerel, de la France Insoumise (FI), déplore la fin de non-recevoir que lui a opposé le candidat macroniste Sébastien Ménard. «Je ne sais même pas si les candidats LREM sont capables de défendre le programme de Macron», lâche le soutien de Jean-Luc Mélenchon. Dans son camp, le candidat FI Pascal Le Brun, dans le Rhône, a retourné le refus de son concurrent en un coup de communication contre lui: il
a organisé un débat factice où une voix off simule les réponses du candidat LREM. «On sent très bien qu'il y a une consigne nationale qui doit découler des prestations d'une qualité plutôt moyenne des candidats», estime le LR Guy Geoffroy, largement devancé par une candidate LREM dans la 9e circonscription de Seine-et-Marne.
«Les hommes et les femmes qui ont réponse à tout m'inquiètent», estime Jean-Paul Delevoye
«Aucune consigne» du parti n'a été donnée à ces candidats, c'est une «décision individuelle», dément Jean-Pierre Delevoye, président de la commission chargée de choisir et d'investir les candidats macronistes. Et de pourfendre les procès en incompétence qui les ciblent: «Quelle prétention du système que de penser que seuls des candidats expérimentés peuvent accéder à la fonction de député!». «Les hommes et les femmes qui ont réponse à tout m'inquiètent», poursuit-il auprès du Figaro, «des candidats qui affichent leurs faiblesses, cela m'intéresse». «Ce que j'attends d'un parlementaire c'est du bon sens, de l'écoute, de l'empathie (...), ce n'est certainement pas de la supériorité».
Les refus de débattre «ne choquent pas» Jean-Paul Delevoye. «Cela frappe les candidats de tous les partis, ce n'est pas uniquement En marche!, et donc il ne faut pas généraliser un phénomène», juge-t-il auprès du Figaro, préférant que «le débat ait lieu avec des jurys citoyens (...) plutôt que sous la forme d'une scène théâtrale dans laquelle le débat n'apporte rien».
Les candidats LREM ne sont pas les seuls à exclure de ferrailler dans un débat avant le second tour. Le ministre Richard Ferrand, candidat LREM dans le Finistère, a ainsi déploré la «triste dérobade» de son opposante LR. «Pitoyable dérobade», avait dénoncé Jean-Marie Le Pen en des termes proches, après le refus de Jacques Chirac de participer au débat de l'entre-deux tours de la présidentielle, en 2002.
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