Dans la maison défense, Emmanuel Macron a fait le grand ménage en seulement trois mois. Exit l'ancien ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian et ses trois plus proches subordonnés (le chef d'état-major des armées, le général Pierre de Villiers ; le délégué général pour l'armement, Laurent Collet-Billon ; et enfin son directeur de cabinet, Cédric Lewandowski), qui ont fait pendant cinq ans la pluie et le beau temps dans la défense. Si ces quatre-là venaient d'horizons très divers et ne seraient jamais partis en vacances ensemble, ils ont travaillé main dans la main dans l'intérêt des armées et de la communauté de défense.
C'était bien sûr quatre forts caractères toujours prêts à en découdre pour défendre la Grande Muette face à la guérilla continuelle de Bercy, qui considère le ministère des Armées comme la variable d'ajustement parfaite du budget général. Des "grandes gueules" qui auraient beaucoup plu à Michel Audiard, le très célèbre dialoguiste des "Tontons flingueurs". Et de temps en temps, le ministre de l'Economie d'alors (Emmanuel Macron) venait d'ailleurs donner un coup de main aux "tontons flingueurs" pour faire plier Bercy, voire Matignon. Un climat tempéré qui a rapidement fait place à une période de glaciation.
Jean-Yves Le Drian envoyé au Quai d'Orsay
C'était peut être trop - un Etat dans l'Etat - pour le nouveau président de la République, qui "aime le sens du devoir, le sens de la réserve". Il a commencé par écarter Jean-Yves Le Drian, jugé peut-être trop populaire à l'Hôtel de Brienne. En dépit de son envie de rester à la défense, l'un des rares poids lourds du précédent gouvernement, qui s'était pourtant rallié à Emmanuel Macron - un ralliement décisif - est envoyé au Quai d'Orsay. Il s'y est montré jusqu'ici très discret sur les affaires liées au ministère des Armées. Seule entorse, il a rendu hommage au général Pierre de Villiers, peu avant la démission de ce dernier.
"C'est un grand soldat, d'une très grand intégrité, d'une très grande intelligence", a affirmé Jean-Yves Le Drian dans un entretien à CNews, évoquant ses relations avec le chef d'état major des armées lorsqu'il était à la Défense. "On a eu des moments de joie, de passion, j'ai beaucoup d'estime pour le général de Villiers", a souligné l'actuel ministre des Affaires étrangères.
Avec la nomination de Jean-Yves Le Drian aux Affaires étrangères, c'est le début de la fin des quatre Fantastiques. Le transfert du ministre de la Défense au Quai d'Orsay a logiquement sonné le départ de Cédric Lewandowski, très craint dans les milieux de la défense et considéré comme le vice-ministre... sinon plus. Très peu désiré par les Macronistes, il est finalement retourné à EDF où il a été nommé patron de la direction Innovation, Stratégie et Programmation. Pour sa part, Laurent Collet-Billon a cru qu'il pourrait rester à la tête de la direction générale de l'armement (DGA) qu'il a finalement quittée le 30 juin après neuf ans de mainmise - un record ! -. Son successeur n'a toujours pas été nommé alors que la DGA est censée trouver des économies de 850 millions d'euros sur le programme 146 à cinq mois de la fin de l'année.
Enfin, le général Pierre de Villiers a été poussé à la démission après un recadrage très inélégant d'Emmanuel Macron devant des centaines d'invités à l'Hôtel de Brienne. Le chef d'état-major des armées, piégé par des fuites, ne méritait pas une telle vexation publique. Lui qui a toujours défendu, comme en octobre 2014, ses troupes sur-sollicitées sur les théâtres d'opérations. Il n'avait alors pas été exécuté par François Hollande pour autant. Mais les temps ont changé, la France est passée d'un président normal à un président jupitérien.
"Nous payons le prix du sang. Nous attendons une légitime solidarité pour les coûts financiers", avait déjà alerté en octobre 2014 le général Pierre de Villiers devant la commission de la défense de l'Assemblée nationale. "Il n'y a pas de gras dans nos armées. On attaque le muscle, alors que la situation sécuritaire se dégrade ! C'est mon devoir de vous le dire."
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