mardi 7 mars 2017

Fillon impose sa candidature à la droite

Après le retrait définitif d'Alain Juppé, qui met fin à l'hypothèse d'un «plan B», le comité politique des Républicains a renouvelé lundi soir à l'unanimité sa confiance à François Fillon.
C'est un tournant, un de plus, dans la campagne de François Fillon. Nicolas Sarkozy estime désormais qu'il a les moyens de se maintenir. «Vendredi, quand il a eu Fillon au téléphone, il a été très dur. Il pensait que sa candidature n'était plus tenable et il le lui a dit», rappelle un très proche de l'ancien chef de l'État, confirmant les informations du Figaro. Le week-end l'a fait changer d'avis. «Nicolas a trouvé que les deux séquences, le Trocadéro et le JT de France 2, ont été objectivement réussies, poursuit ce membre du premier cercle sarkozyste. Il estime que ce sera difficile, très difficile même, notamment à cause de la défection des centristes, mais que c'est à Fillon et à lui seul d'apprécier s'il est en situation de gagner ou pas.» Dimanche, en faisant son footing, l'ex-président a croisé des passants qui lui ont dit: «Il faut que Fillon tienne bon!» «Ça l'a marqué», s'amuse l'un de ses interlocuteurs habituels.

Nicolas Sarkozy a eu Alain Juppé au téléphone à deux reprises. Dimanche soir, le maire de Bordeaux l'a prévenu qu'il allait enterrer définitivement l'hypothèse de sa candidature. Les deux hommes se sont à nouveau parlé lundi, après la déclaration d'Alain Juppé à la presse. Entre-temps, Nicolas Sarkozy a réuni le noyau dur de ses fidèles rue de Miromesnil. Parmi les présents: Brice Hortefeux, François Baroin, Christian Estrosi, Christian Jacob, Laurent Wauquiez, Luc Chatel et Éric Ciotti. «Il y avait presque autant de positions que de participants, raconte un témoin de la discussion. Hortefeux cherche toujours à débrancher Fillon. Baroin est convaincu que Fillon sera candidat jusqu'au bout et vise Matignon en cas de victoire, Wauquiez joue Fillon pour récupérer la tête des Républicains, mais Estrosi, lui, voit Baroin à l'Élysée. Jacob soutient Fillon par légitimisme et parce qu'il ne voit pas comment un autre candidat pourrait s'imposer, et Chatel comme Ciotti font sa campagne en croyant qu'il a encore une chance de gagner.»
«Je sens depuis samedi une espèce de sursaut de mobilisation de notre électorat», a confirmé au Figaro Éric Ciotti, en se disant «surpris par la quantité de messages de soutien au candidat» qu'il reçoit. «Il a eu droit à un très bon accueil à la CGPME, le syndicat des petits patrons, bref la rivière retrouve son cours», se réjouit le président du conseil départemental des Alpes-Maritimes.
Christian Jacob a été mandaté par les sarkozystes pour transmettre un message à François Fillon. L'entourage du patron des députés LR en résume l'esprit: «L'essentiel est de garder l'unité de notre famille. C'est toi qui as les clés. Soit, en ton âme et conscience, tu penses que tu peux unir la famille, soit tu considères que tu n'es pas le mieux placé et c'est à toi de désigner ton successeur.» Jacob devait aussi relayer le souci, exprimé autour de la table du petit déjeuner, de récupérer les centristes. «Il faut aujourd'hui faire revenir l'UDI dans la campagne, souligne un sarkozyste, et c'est à Fillon de proposer une sortie de crise.» Une entreprise qui s'annonce difficile, puisque Jean-Christophe Lagarde a affirmé lundi que les Républicains devaient «changer de candidat pour avoir une chance de gagner», le candidat en titre ne rassemblant «plus personne». Le président de l'UDI a annoncé qu'il réunirait son bureau exécutif mardi soir.
Mardi matin, le petit déjeuner prévu par Brice Hortefeux doit toujours avoir lieu, mais le député européen, qui a lancé l'invitation à ses amis sarkozystes la semaine dernière, n'a pas eu que des réponses positives. «Je ne suis pas là mardi et, de toute façon, je ne trouve pas que ce soit une très bonne idée de nous rassembler en écuries», confie Luc Chatel.

Sarkozy, lui, veut placer Fillon devant ses responsabilités quand il le verra. L'ex-chef de l'État a prévenu le candidat avant de publier son invitation à un sommet à trois avec Juppé. Dans le communiqué qu'il a publié lundi, avant la déclaration de renoncement du maire de Bordeaux, il affirme: «Notre désunion fera le lit de l'extrême droite. C'est dans cet esprit que je propose à François Fillon et à Alain Juppé de nous réunir pour trouver une voie de sortie digne et crédible à une situation qui ne peut plus durer et qui crée un trouble profond chez les Français.» Le rendez-vous pourrait avoir lieu mardi, au plus tard mercredi.
Quant aux juppéistes, ils se retrouveront dès mardi au Sénat pour un petit déjeuner organisé par Jean-Pierre Raffarin. Le but est de se rappeler au bon souvenir de François Fillon, pas d'imaginer une nouvelle alternative à sa candidature. Tous les espoirs des amis du maire de Bordeaux se sont effondrés quand ils ont écouté sa déclaration solennelle, lundi. Évoquant d'abord avec émotion «les appels» à «prendre la relève», ses hésitations, ses réflexions, Juppé a annoncé que sa décision était prise, «une bonne fois pour toutes» : «Je ne serai pas candidat à la présidence de la République
«Il est trop tard pour moi», a-t-il dit à deux reprises, avec une tristesse évidente, en confiant: «Je ne veux pas livrer mon honneur et la paix de ma famille en pâture aux démolisseurs de réputation.» Il a aussi condamné durement «l'obstination» de François Fillon et «son système de défense, fondé sur la dénonciation d'un prétendu complot et d'une volonté d'assassinat politique (qui) l'ont conduit dans une impasse». En début d'après-midi, Alain Juppé est apparu comme soulagé à sa traditionnelle conférence de presse précédant le conseil municipal de Bordeaux. «Si je peux aider, sans revenir sur ma décision, à trouver une solution à la crise actuelle, j'y contribuerai», a-t-il promis.
Lors du comité politique qui s'est tenu le soir à l'initiative de son président, Gérard Larcher, et du secrétaire général de LR Bernard Accoyer, François Fillon a tenu un discours de vainqueur: «La semaine dernière, un certain nombre de responsables de notre mouvement se sont désolidarisés de ma campagne. J'ai choisi de faire appel à nos électeurs en organisant dimanche un grand rassemblement à Paris. (…) Ce rassemblement a été un immense succès: par son ampleur et par sa dignité. (…) Pour ma part, je considère que ce rassemblement confirme la légitimité que je tire de la primaire de la droite et du centre.»
À l'origine, ce comité politique devait dans l'esprit de ses organisateurs permettre le passage de relais entre François Fillon et Alain Juppé. Au final, ce comité a, selon Larcher, renouvelé «à l'unanimité son soutien» à Fillon.

Appel au rassemblement

S'adressant aux soutiens du maire de Bordeaux qui faisaient grise mine, le candidat a affirmé: «Il y avait une ouverture dans mon discours dimanche, Alain Juppé a répondu. C'était la seule alternative possible. Donc le sujet est clos.»«Tu as mis fin aux hésitations, le débat est clos», a répété Gérard Larcher en écho, tout en prévenant: «Il faut maintenant rassembler. Les sondages sont mauvais, il y a à faire.» François Fillon n'était pas disposé à se laisser faire la leçon. «Il est temps maintenant que chacun se reprenne et revienne à la raison, a-t-il lancé. Nos électeurs ne pardonneraient pas ceux qui entretiennent le poison de la division. J'appelle toutes les femmes et les hommes de bonne volonté à se rassembler, à respecter le message que nos électeurs ont exprimé lors de la primaire et à s'unir autour de ma candidature qui est la seule légitime.»

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