dimanche 20 août 2017

François Fillon : "Le totalitarisme islamique vise à créer les conditions d'une troisième guerre mondiale"


François Fillon, candidat à la primaire de la droite et du centre, publiait ce jeudi 29 septembre son livre Vaincre le totalitarisme islamique. Il revient pour Atlantico.fr sur ses propositions en matière de terrorisme, notamment, ainsi que sur son évolution dans la primaire.

Atlantico : Depuis la rentrée vous expliquez dans vos discours qu'il n'y a pas de problème de communautarisme en général en France mais un problème particulier provoqué par l'islam radical, et vous publiez un livre "Vaincre le totalitarisme islamique" dans lequel vous rappelez vos propositions en la matière et remettez quelques idées en place...


François Fillon : Après les attentats de Nice, j'ai été sidéré par la faiblesse des analyses politiques et par ce que j'appelle "le concours Lépine" des réactions et solutions les plus extravagantes les unes que les autres. Je n'ai trouvé nulle part un dirigeant politique qui prenne le temps d'expliquer la nature de la menace qui pèse sur nous - ce que j'appelle le totalitarisme islamique - ni quelle réponse internationale doit être apportée à cette menace, ni enfin quelles réponses en matière de sécurité intérieure.
Ajoutez à cela qu'une partie de la droite s'est lancée dans une espèce de fuite en avant pour s'assoir le plus violemment sur l'Etat de Droit... J'ai considéré que je ne pouvais pas continuer à laisser faire et j'ai décidé de rassembler dans un livre des analyses et des propositions qui sont les miennes depuis longtemps mais qui retrouveraient toute leur cohérence dans un livre... Je l'ai écrit entre le 14 juillet et le 30 août... 

Dans votre discours de rentrée à Sablé-sur-Sarthe vous avez longuement parlé de ce sujet et employé pour la première fois employé le terme totalitarisme...

C'est exact, et j'ai pris le temps d'expliquer pourquoi je parle de totalitarisme islamique. On parle de terrorisme, de djihadisme, mais je suis l'un des seuls à utiliser ce mot ; j'y attache beaucoup d'importance car je veux évidemment faire référence au nazisme. Je veux démontrer que nous ne sommes pas confrontés à une menace ponctuelle, passagère, mais qu'il s'agit d'un mouvement puissant, visant à prendre le contrôle d'une grande partie du monde avec des méthodes et une idéologie totalitaires, voire une tentation génocidaire, à l'encontre des chrétiens d’Orient, des juifs qu'ils veulent expulser d'Israël. Et ce mouvement totalitaire est en train de créer les conditions d'un affrontement que je qualifie de risque d'une troisième guerre mondiale.
Si on ne dit pas cela, on s'enferme dans des débats franco-français sur notre protection, ce qui est stérile si on n'est pas capable de mener simultanément le combat contre ce totalitarisme islamique et le combat pour la sécurité nationale. Beaucoup trop d'hommes politiques français, soit parce qu'ils n'ont pas mesuré l’ampleur de la menace, soit parce qu'ils ont la tête baissée dans le guidon, sont dans la réaction immédiate, souvent électoraliste. Du coup, ils proposent des mesures inefficaces.

Par exemple ?

Tant que l'on n'a pas éradiqué la source des attentats, il continuera d'y en avoir. On peut mettre en place tous les systèmes de sécurité, il y a toujours des commanditaires de plus en plus puissants, qui ont de plus en plus d'argent, de plus en plus d'influence et qui trouveront toujours les moyens de contourner nos dispositifs. Donc, le combat contre le totalitarisme islamique doit être livré au coeur du mal, au Proche et Moyen Orient, et pour cela, il faut rassembler toutes les forces possibles, tous les Etats possibles, qu'ils soient démocratiques ou non, qu'on les aime ou qu'on ne les aime pas... De Gaulle, Churchill, Roosevelt s’étaient bien alliés avec Staline pour vaincre le nazisme ! L'urgence c'est de lutter contre ce nouveau totalitarisme et de le battre.

Reconnaissez que votre discours est difficilement audible avec ce qui se passe en ce moment à Alep !

Eh bien non ! L’horreur d’Alep ne doit pas effacer notre raisonnement géopolitique. Ca n’est pas parce qu'il y a un événement extrêmement dramatique, que je condamne avec la plus extrême vigueur, qu’il ne faut pas voir la réalité du problème de fond qu’il nous faut résoudre. 

On a quand même le sentiment que les Russes n'étaient pas vraiment désireux de faire partie d'une grande coalition…

C'est faux ! On leur claqué la porte au nez depuis quatre ans ! Dans mon précédent ouvrage, je relate un entretien avec Vladimir Poutine en 2011, où nous avons évoqué ensemble la possibilité de trouver une solution de transition pour sortir Bachar el Assad. La Russie défend ses intérêts en Syrie, elle n’a pas toujours défendu bec et ongles Assad. Au lieu de comprendre cela, au lieu de créer une brèche dans la stratégie du Kremlin, on a méprisé Moscou, les Américains en tête. Ensuite, nous nous sommes accrochés à l'idée que tant que Bachar El Assad serait là, rien ne serait possible. Nous avons tous défendu cette idée, Nicolas Sarkozy, Alain Juppé et moi-même... Sans parler de François Hollande qui avait fait naïvement du départ de Bachar El Assad, "le préalable" de toute solution politique en Syrie. Mais je me suis rendu compte en allant sur place que le régime de M. El Assad tiendrait, malgré tous ses crimes, parce qu'il est soutenu par une partie de sa population.

A quel moment avez-vous fait ce constat ?

J'ai reçu le Premier ministre libanais de l'époque, les derniers jours du quinquennat, en 2012. Il m'a expliqué que Bachar El Assad serait encore là longtemps, parce qu'il avait le soutien des Alaouites, des Chrétiens, de toutes les minorités à l'exception des Sunnites. Par la suite, quand je suis allé au Liban tous les responsables chrétiens libanais rencontrés sur place m'ont expliqué que notre stratégie était vouée à l'échec.

Vous n'avez pas voulu voter la réforme constitutionnelle sur la déchéance de nationalité ; vous vous distinguez aussi de certains de vos concurrents en ne voulant pas modifier les règles de la laïcité. Pourquoi ? 

J'ai fait le choix d’affirmer qu’on ne peut plus continuer à lutter contre l'intégrisme musulman en durcissant à l’infini les règles de la laïcité. On ne plus se cacher derrière le combat contre le communautarisme pour ne pas dire les choses telles qu’elles sont : en France, il n’y a pas de problème avec la plupart des communautés religieuses mais un problème avec l’Islam et sa radicalisation. A vouloir faire voter des lois pour durcir encore davantage les règles de la laïcité, nous risquons de porter une atteinte grave à la liberté religieuse, ce qui est inacceptable à mes yeux, compte tenu de ce qu'est la France, et de ce qu'elle représente en termes de liberté et de démocratie. Lorsque j’entends les discours de ceux qui veulent interdire tout signe religieux dans l'espace public, on part en vrille ! On ne va tout de même pas interdire aux gens de se promener avec une croix ou une kippa, ou encore de porter un T-shirt à l'effigie du pape. Les religions ont des siècles d'histoire. Faut-il que catholiques, protestants, juifs, musulmans modérés renoncent à toute visibilité à cause de l’Islam radical et des provocations du burkini ? Cela ne peut aboutir qu’à des tensions et plus le ton va se durcir, plus on va vers des affrontements. C'est exactement ce que veulent les totalitaires islamistes : ils veulent la guerre des religions, chez nous. 

Faut-il, comme le proposent certains, interdire le salafisme ?

Non, on ne peut interdire une pensée, mais il faut dissoudre ces associations qui se réclament du salafisme et des Frères Musulmans comme on a dissous les organisations d'extrême gauche ou d'extrême droite en d'autres temps. On s'est emparé du mot salafisme, mais les Frères Musulmans ont exactement les mêmes objectifs.

Alors comment combattre l'intégrisme musulman ?

En suscitant la création d'une autorité religieuse, comme Napoléon a imposé le consistoire aux Juifs ; il faut imposer la même chose aux Musulmans. Nicolas Sarkozy avait eu l'intelligence de le tenter avec la création du CFCM mais ça n'a pas marché parce que la désignation de ses membres se fait sur un mode qui donne le contrôle de l'instance à des pays étrangers. Il faut créer un organisme avec des théologiens, des hommes et des femmes respectés qui puissent servir d'intermédiaire dans le travail en profondeur qui doit être conduit pour amener la majorité des musulmans à se rebeller contre l'intégrisme. Je vais plus loin en disant qu'il faut interdire les financements étrangers et qu’il ne faut pas de financements publics car les musulmans sont suffisamment nombreux en France pour financer leur culte. 

Est-ce que cela vous amène également à demander que l'on revoie les relations de la France avec certains pays étrangers ?

Nous ne pouvons pas continuer à être les alliés exclusifs des sunnites contre les chiites. La France devrait avoir des alliés des deux côtés. On n'a pas à prendre parti et nous ne pouvons pas continuer à fermer les yeux sur le fait que le wahhabisme est la matrice de l'intégrisme. C'est là que tout commence. On ne peut pas non plus fermer les yeux sur le fait que l'Arabie Saoudite encourage ou finance des mouvements qui font cause commune avec ceux qui nous combattent. Il faut dialoguer avec les Saoudiens, mais je veux qu'on parle aussi avec les Russes, l'Iran, avec tous ceux qui peuvent être utiles à la destruction de l’Etat islamique. 

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