Revirements, polémiques, majorité... Emmanuel Macron maîtrise-t-il son été?
Il voulait une présidence maîtrisée et sans couacs, c'est exactement le contraire qui semble se produire.
02/08/2017 13:51 CEST | Actualisé il y a 1 heure
POLITIQUE - Cela devait être droit, vertical, net et sans bavure. Emmanuel Macron, chantre d'une "présidence jupitérienne" avait retenu les leçons du quinquennat de son prédécesseur, miné par les couacs dès son entrée en fonction. L'idée était de faire précisément l'inverse, quitte à bouleverser les relations entre l'Elysée et la presse, afin que la maîtrise présidentielle sur le cours des événements soit totale.
A part à l'international, où il s'est distingué par son volontarisme, rien ne s'est passé comme prévu pour le nouveau chef de l'État. Les affaires Bayrou et Ferrand ont contraint Emmanuel Macron à se séparer prématurément de deux poids lourds, l'affaire Pénicaud continue de menacer la ministre du Travail, et son clash avec l'ex-chef d'état major des armées a laissé des séquelles.
Outre les difficultés qu'il a eues à surmonter, le président de la République doit aussi composer avec une majorité qui peine à trouver ses marques à l'Assemblée nationale, et ce dans un contexte où Richard Ferrand est contesté en interne. Une situation qui oblige Emmanuel Macron à aborder son été en navigant à vue, au risque de s'exposer à des revirements pouvant affecter une popularité déjà (fortement) en baisse.
APL, migrants, dotations...
"C'était une connerie sans nom!". Voilà comment Emmanuel Macron a perçu la baisse des APL de 5 euros annoncée par le gouvernement, selon des propos rapportés par Le Canard enchaîné. "Pas la peine de se retrouver dans des débats complètement dingues qui n'ont fait l'objet d'aucun engagement", a-t-il éructé devant ses ministres, leur demandant de "s'en tenir à ce qu'on avait dit pendant la campagne".
Ce n'est pas le seul sujet sur lequel le chef de l'État semble avoir une divergence de vue avec son équipe gouvernementale. Sur la question migratoire, Emmanuel Macron et ses ministres soufflent le chaud et le froid, s'opposant d'abord à la construction de centres d'urgence à proximité de Calais, avant d'annoncer deux semaines plus tard l'ouverture de deux structures d'accueil dans les Hauts-de-France. "On ne va pas reconstituer des camps, ce sont des structures qui ne génèrent que des problèmes", avait pourtant affirmé Jacques Mézard, ministre de la Cohésion des territoires, en marge de la présentation du "plan migrant".
Tâtonnements également sur le dossier des dotations aux collectivités locales. Alors que le chef de l'État s'était engagé début juillet devant les élus locaux à ne pas procéder "par baisse brutale de dotations", on apprend ce mercredi 2 août que l'exécutif a publié un décret trois jours plus tard pour raboter de 300 millions l'aide de l'État aux collectivités territoriales. Qu'importe que cette baisse affecte l'investissement, et non le fonctionnement, certains élus voient dans cette disposition prise en catimini une "trahison". "Pour l'instant, c'est le bazar à tous les étages. Ca pourrait presque être nous au pouvoir!", ironisait dans Le Monde un proche de François Hollande.
Autre déconvenue, l'adoption laborieuse de la loi sur la moralisation de la vie publique. Alors que le texte est critiqué pour l'abandon du casier judiciaire vierge pour les élus, son examen final a été repoussé d'une semaine à cause d'un désaccord entre l'Assemblée et le Sénat sur l'abandon de l'IRFM. Un report qui offre aux détracteurs du texte sept jours de joutes supplémentaires.
Couacs et recadrages
Alors que s'installe progressivement l'impression que son début de quinquennat lui échappe, Emmanuel Macron a réuni sa garde rapprochée pour une "réunion stratégique" à l'Elysée, rapporte Le Monde. Autour de lui, Richard Ferrand, François Patriat, Christophe Castaner ou encore Gérard Collomb. "On s'est 'bercyisé'. C'est tout l'inverse de ce que le président veut faire. Il ne veut pas gérer, il veut transformer", confie au quotidien l'un des participants à ce recadrage.
Selon Le Figaro, Emmanuel Macron aurait également remonté les bretelles de ses ministres les moins expérimentés, à l'occasion du conseil des ministres du 12 juillet. "C'est du pipi de chat, ce qui me remonte actuellement dans certaines de vos notes. Ne vous laissez pas enfermer dans le confort des documents rédigés par vos administrations. Certes, cela peut vous paraître sympathique et confortable de vous placer entre leurs mains. Mais vous verrez, dans six mois, si vous continuez, vous aurez disparu", s'est il emporté.
Si l'Elysée a démenti l'utilisation de l'expression "pipi de chat", c'est bien celle-ci qui a été reprise et commentée partout dans la presse, entretenant ainsi l'image d'un début de quinquennat non maîtrisé.
D'autant que le spectacle offert par la majorité n'est pas pour le rassurer. Quand ce n'est pas la députée Claire O'Petit qui invite les étudiants à ne pas "pleurer pour cinq euros", les parlementaires LREM rejettent un article par erreur, au grand dam du président de la séance, déjà sur le fil en raison des prestations contestées de ses collègues au perchoir. La lente actualité estivale aidant, l'attention médiatique se focalisait sur le spectacle joué tous les jours au Palais Bourbon.
"C'est inévitable que cela ne fonctionne pas comme avec des parlementaires aguerris qui ont quinze ans de métier. Des jeunes sont arrivés, ils ont pris des responsabilités que certains n'étaient pas en mesure d'assumer, je l'entends bien, mais néanmoins les lois ont quand même été votées. D'accord, il y a eu des couacs et des dysfonctionnements, mais c'est mineur", explique au Parisien François Patriat, président du groupe LREM au Sénat.
Et ce dernier de relativiser la mauvaise passe d'Emmanuel Macron: "il ne faut pas avoir peur d'assumer l'impopularité sur de vraies réformes de fond. Et il vaut mieux être impopulaire au début et avoir des résultats ensuite plutôt que l'inverse, comme l'a fait François Hollande".
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