Coignard - François Fillon, 105 ans de mandats politiques !
Le candidat vante ses "36 ans au service du pays" pour asseoir son "autorité morale". Une riposte à la "fraîcheur politique" d'Emmanuel Macron.
PAR SOPHIE COIGNARD
Modifié le - Publié le | Le Point.fr
François Fillon attaque Emmanuel Macron sur son manque d'expérience ce mardi dans La Voix du Nord, comparant ses « trente-six ans au service du pays » aux « trois ans passés à la banque Rothschild » par son concurrent. C'est un nouvel angle après les piques contre « Emmanuel Hollande », dont il disait déjà, début avril, lors de son meeting à Ajaccio en Corse, qu'il « n'a rien du renouveau, mais tout de l'Ancien Régime ».
Cette offensive est aussi une illustration de l'adage selon lequel la meilleure défense est l'attaque. Le candidat d'En marche ! n'épargne pas ses concurrents sur le thème de l'usure du pouvoir. À Besançon, le 11 avril, il avait raillé Jean-Luc Mélenchon : « Il était sénateur socialiste, j'étais encore au collège. »
Or, selon un inventaire opéré par l'Agence France-Presse, le leader de La Franceinsoumise, avec trente-quatre ans de vie politique et cinquante-cinq ans et demi de mandats cumulés, n'arrive qu'en quatrième position en termes de longévité, quasiment ex æquo avec Nicolas Dupont-Aignan (vingt-deux ans de carrière publique, mais plus de cinquante-six ans de mandats en tant que maire, député, élu à la communauté d'agglomération).
Ils sont loin derrière Jean Lassalle et François Fillon. Le premier, élu maire de Lourdios-Ichère en mars 1977, est assis dans ce fauteuil depuis plus de quarante ans. Il a aussi été conseiller général des Pyrénées-Atlantiques pendant trente-trois ans, de 1982 à 2015, et même vice-président de ce département durant dix ans (1991-2001). Le second affiche au compteur plus de cent cinq ans de carrière d'élu ou de ministre, si l'on compte ses activités communales, intercommunales, départementales, régionales, parlementaires et ministérielles depuis trente-six ans. On est encore loin de Christian Poncelet, ancien président du Sénat, qui a mis fin en 2015 à près de cent cinquante ans de mandats électifs !
Expérience contre renouveau
De tels chiffres plaident pour une stricte limitation du cumul des mandats, pas seulement en simultané, selon la loi votée sous la mandature qui se termine, mais aussi dans le temps. En effet, dans aucune démocratie moderne, des candidats à la magistrature suprême ne peuvent exciper de tels records de longévité, comme si la politique, en France, était par nature un emploi à vie. Les deux derniers présidents des États-Unis, au-delà de toutes leurs différences, présentent des curriculum vitae qui ne doivent pas tout à la vie publique. Même Angela Merkel, doyenne des dirigeants européens, n'a remporté sa première élection qu'il y a 25 ans. Elle a eu, auparavant, une vie professionnelle en tant que scientifique, spécialiste de chimie quantique.
En France, les électeurs préféreront-ils faire confiance à l'expérience, qui a montré ses limites, ou au renouveau, porteur d'incertitudes ? C'est un mystère difficile à percer. Les opposer est donc un jeu risqué pour les deux candidats les plus antagonistes sur ce point, François Fillon et Emmanuel Macron.
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