jeudi 27 avril 2017

Emmanuel Macron est monté sur la scène du Parc des expositions, à Paris, main dans la main avec sa femme Brigitte, à l'issue du premier tour de la présidentielle. Une première.


Aucun homme politique un jour en lice pour une élection présidentielle n'avait osé cette mise en scène. Dimanche 23 avril, à l'issue du premier tour de la présidentielle, Emmanuel Macron est monté sur le podium aménagé au Parc des expositions, porte de Versailles, accompagné de son épouse. Main dans la main, sourires émus, saluant ensemble «leur» public.
En 2007, Nicolas Sarkozy était arrivé seul, au premier et au second tour, sur la scène du 18 de la rue d'Enghien (Paris Xe). C'est seulement quelques heures plus tard qu'il avait célébré publiquement sa victoire avec son épouse Cécilia, place de la Concorde. En 2002, Jacques Chirac avait respecté ce même schéma, n'apparaissant en couple qu'après son discours officiel de président, sur la place de la République. Reste qu'en 2012, Valérie Trierweiler avait fait une apparition à Tulle, en Corrèze, lors du premier discours de François Hollande président, avant de partir pour la place de la Bastille, à Paris, tard dans la soirée, et de demander, peu discrètement, un baiser sur la bouche à son compagnon.
Comment qualifier cette première ? «D'extrêmement surprenante», répond Jamil Dakhlia, sociologue des médias. «Ce sont des images que l'on a plutôt l'habitude de voir à l'issue d'un second tour, ou aux États-Unis avec Barack et Michelle Obama. On sent le souhait d'Emmanuel Macron de se couler dans le modèle du "couple présidentiel".»
Pour l'auteur de Politique People (Éd. Bréal, 2015), le candidat d'En marche ! l'a fait «pour témoigner du rôle qu'elle a joué dans sa campagne». «Elle était sa responsable des relations publiques, en quelque sorte. Elle lui a fait rencontrer de nombreuses personnalités. Dans ses déplacements, elle a beaucoup joué ce rôle d'intermédiaire avec les Français.» Notons néanmoins qu'il l'a fait en respectant un schéma un peu traditionnel : «Brigitte était là, mais n'a pas pris la parole.»
Si la démarche est bienveillante, elle apparaît aussi «très risquée» pour le sociologue. «D'abord, c'est une mise en scène présidentielle, alors qu'on n'y est pas. De plus, quand on fait intervenir l'épouse, il y a toujours ce soupçon d'illégitimité. Ce n'est pas elle qui se présente devant les électeurs. Elle n'a pas à intervenir sur la scène publique à ce stade. On est à la limite de ce qui est possible.»
L'apparition du couple sur la scène du parc des Expositions (Paris XVe) n'est pourtant pas si surprenante. Depuis qu'elle s'est mise en disponibilité de l'Éducation nationale (en juin 2015), Brigitte Trogneux est plus ou moins discrètement partout et tout le temps. «Brigitte, viens avec moi ! Si, viens !», l'avait déjà appelée Emmanuel Macron sur la scène du théâtre Antoine (Paris Xe), lors de son meeting pour la Journée internationale des femmes, avant de l'embrasser devant ses militants. «Emmanuel Macron en a besoin», nous disait récemment Alix Bouilhaguet, auteure du Couloir de Madame (Éd. de l'Observatoire, 2017). «Il part du principe que c'est mieux à deux.»
Stephen Bunard, synergologue-conférencier, repère tout de suite cet «élan d'affection spontané» du candidat au moment de la montée sur scène du couple, le 23 avril. «Il monte les marches en tenant la main de Brigitte de la main droite, la "dominante". Mais durant les premiers pas qu'il fait sur scène, il rajoute sa main gauche pour tenir celle de sa femme des deux mains, constate l'expert en langage corporel. La gauche, c'est celle de la spontanéité, elle plaide pour dire qu'il y a une vraie envie de "partager" de la part du candidat.»
Si la prestation d'Emmanuel Macron apparaît naturelle et détendue, celle de Brigitte Trogneux interroge. Moment gênant ? Instant de grâce ? Celle qui nous a habitués à une étonnante agilité dans les médias ne semble pas aussi à l'aise que d'habitude. «Vulgairement, on pourrait dire qu'elle ne sait pas où se mettre, observe Stephen Bunard. Sa tête penchée montre qu'elle est dans une posture de retrait. Alors qu'Emmanuel Macron lève le bras en signe de victoire, elle a la main devant elle, comme pour dire "merci, mais c'est trop".»
Brigitte aurait-elle atteint son quota de médiatisation ? Ou s'est-elle dit que c'était peut-être un peu tôt ? «Arrivée sur la scène, elle se gratte la tête à droite, ce qui traduit la volonté de trouver une aide extérieure», poursuit le spécialiste des gestes. «Quelques secondes plus tard, elle affiche une "bouche en huître", c'est-à-dire que ses deux lèvres rentrent dans la bouche, signe de retrait, encore, et de contrôle. Cette expression est surtout observable chez les femmes qui, quand elles se sentent trop regardées, vont rentrer leurs lèvres, ces éléments clés de la séduction.»

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