Poisson : “Les médias ont auto-proclamé le choix des Français pour Macron”
/ Jeudi 27 avril 2017 à 16:54
Interview. Après la défaite de la droite dès le premier tour de l'élection présidentielle, le président du Parti chrétien démocrate (PCD), Jean-Frédéric Poisson, justifie le positionnement de son parti sur la ligne du “ni-ni”. Et se projette déjà vers l'après présidentielle et la recomposition de la droite.
Valeurs actuelles : Quel est votre état d’esprit au lendemain du premier tour ?
Jean-Frédéric Poisson : Mes pensées au lendemain de ce premier tour vont à François Fillon qui a mené cette campagne dignement. C’est trop facile, trop lâche, de mettre sur le seul dos de François Fillon cette défaite. Sa défaite, c’est une défaite collective : celle de la droite tout entière. J’ai aussi un goût amer dans la bouche, car François Fillon n'a pas su se faire entendre des Français. Ma position à l’égard d'Emmanuel Macron et envers Marine Le Pen n'a pas changé. Entre un ultralibéralisme qui déconstruirait la France et laissera les plus faibles sur le bas-côté, et un gouvernement étatiste encourageant le repli sur soi, les Français se retrouvent pris en otage.
Jean-Frédéric Poisson : Mes pensées au lendemain de ce premier tour vont à François Fillon qui a mené cette campagne dignement. C’est trop facile, trop lâche, de mettre sur le seul dos de François Fillon cette défaite. Sa défaite, c’est une défaite collective : celle de la droite tout entière. J’ai aussi un goût amer dans la bouche, car François Fillon n'a pas su se faire entendre des Français. Ma position à l’égard d'Emmanuel Macron et envers Marine Le Pen n'a pas changé. Entre un ultralibéralisme qui déconstruirait la France et laissera les plus faibles sur le bas-côté, et un gouvernement étatiste encourageant le repli sur soi, les Français se retrouvent pris en otage.
VA. Pour quelle raison la droite est-elle absente du second tour ?
Pour des raisons d'acharnements médiatiques, sans doute, mais surtout à l’incapacité des Républicains à s'accorder sur une ligne politique. L'appel d'air vers Emmanuel Macron qui ébranle ces jours-ci Les Républicains est emblématique de leur incapacité à trancher entre deux lignes inconciliables qui traverse le parti : ce clivage concerne d'une part ceux qui sont favorables à une soumission toujours plus grande à l'économie et au marché, et ceux qui considèrent que la première valeur à défendre est la dignité humaine et ce qui participe à la protéger, famille, corps intermédiaires et nation.
Pour des raisons d'acharnements médiatiques, sans doute, mais surtout à l’incapacité des Républicains à s'accorder sur une ligne politique. L'appel d'air vers Emmanuel Macron qui ébranle ces jours-ci Les Républicains est emblématique de leur incapacité à trancher entre deux lignes inconciliables qui traverse le parti : ce clivage concerne d'une part ceux qui sont favorables à une soumission toujours plus grande à l'économie et au marché, et ceux qui considèrent que la première valeur à défendre est la dignité humaine et ce qui participe à la protéger, famille, corps intermédiaires et nation.
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L'éclatement de la droite est la conséquence de l’infidélité de certains cadres vis-à-vis de leur parti, mais aussi d'une terrible infidélité du parti lui-même à ses propres engagements.
Les renoncements trop fréquents, la lâcheté et l'ambition personnelle au détriment de la propre famille politique ont contribué à cet échec. Les Républicains n'ont pas uniquement oublié leurs obligations à l’égard de leur parti, ils sont aussi lâché leurs électeurs qui se retrouvent aujourd'hui écartelés entre deux options néfastes pour notre pays.
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VA. Les ténors de la droite pointent François Fillon du doigt. Quelle est la responsabilité du candidat dans la défaite ?
Il est toujours facile de jeter la pierre à son prochain, mais ce n'est pas mon style. Je maintiens que François Fillon avait le programme le plus adapté au redressement du pays. Mon discours n'a jamais changé sur ce point. Les électeurs des Républicains ont fait leur choix lors de la primaire, nous ne pouvions pas trahir leur vote en cours de route. Cela aurait été malhonnête.
Il est toujours facile de jeter la pierre à son prochain, mais ce n'est pas mon style. Je maintiens que François Fillon avait le programme le plus adapté au redressement du pays. Mon discours n'a jamais changé sur ce point. Les électeurs des Républicains ont fait leur choix lors de la primaire, nous ne pouvions pas trahir leur vote en cours de route. Cela aurait été malhonnête.
Je remarque tout de même que les trois primaires organisées en vue de cette élection présidentielle ont désigné des candidats proches des militants mais minoritaires au sein de leurs familles politiques respectives. J'y vois encore une preuve du décalage entre les attentes des électeurs et les cadres des LR qui justifie la clarification idéologique que j'appelle de mes vœux.
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VA. Cet échec marque la fin du “ni-ni”. Les responsables républicains se prononcent de manière quasi-unanime pour Emmanuel Macron. Quelle est votre position ?
Ça n’est pas la fin du “ni-ni” puisque le Parti Chrétien Démocrate l’adopte comme sa position en la circonstance ! Mais il est vrai que la position des leaders LR est incompréhensible et inacceptable pour de très nombreux électeurs. On combat pendant des mois Emmanuel Macron jusqu’à 19h59 le 23 avril, pour lui apporter un soutien unanime à 20h01 le même jour ? Très dur à avaler pour les électeurs, les sympathisants, les soutiens, les militants !
Ça n’est pas la fin du “ni-ni” puisque le Parti Chrétien Démocrate l’adopte comme sa position en la circonstance ! Mais il est vrai que la position des leaders LR est incompréhensible et inacceptable pour de très nombreux électeurs. On combat pendant des mois Emmanuel Macron jusqu’à 19h59 le 23 avril, pour lui apporter un soutien unanime à 20h01 le même jour ? Très dur à avaler pour les électeurs, les sympathisants, les soutiens, les militants !
Ma position est ferme. Les médias ont désigné leur candidat dès le début de la campagne. Ce sont eux qui ont auto-proclamé le choix des français pour Emmanuel Macron. Cet argument qui consiste à enterrer le “ni-ni” avant même que la campagne du second tour ne soit entamée est encore un moyen dictatorial d'orienter la pensée des électeurs.
L'abstention, même si elle n'est pas institutionnellement reconnue, représente une opinion. Cela peut être de l'indifférence mais aussi de la colère, un refus de répondre à un système prédéfini qui enfermerait notre choix. Il faut en tenir compte. Pour ma part, je n’appellerai à voter en l'état actuel ni pour Emmanuel Macron, ni pour Marine le Pen.
VA. Vous critiquez le projet de Macron mais celui du FN, notamment la position frontiste sur l'euro, la préférence nationale, la peine de mort. Marine Le Pen n’est-elle pas, de votre point de vue, un moindre mal par rapport au projet du candidat En Marche !, notamment sur les questions sociétales (protection de la vie, immigration…) ?
C'est vrai, il y a entre le programme du FN et celui du PCD des points communs – et d’ailleurs avec le projet des LR également, ce n'est pas la première fois que je le souligne. Mais la politique est à la fois une question d'idées et une affaire pratique. Or, il y a un risque réel de blocage institutionnel avec l'arrivée de Marine Le Pen au pouvoir.
C'est vrai, il y a entre le programme du FN et celui du PCD des points communs – et d’ailleurs avec le projet des LR également, ce n'est pas la première fois que je le souligne. Mais la politique est à la fois une question d'idées et une affaire pratique. Or, il y a un risque réel de blocage institutionnel avec l'arrivée de Marine Le Pen au pouvoir.
Nous avons cependant avec le FN de grandes divergences. Je pense à leur projet économique qui ne laisse pas assez de place à l'initiative et à la responsabilité personnelle, mais aussi à la porte ouverte à la peine de mort, qui est pour moi un point non négociable, ou encore une laïcisation latente des espaces publics, une volonté de nationalisation de l’école, de rupture avec une Europe que je veux moi aussi différente de celle qu’on nous a imposée sans pour autant vouloir la quitter...
VA. Sur twitter, vous parlez de recomposition de la droite. De quoi parlez-vous précisément ? Le Front national, annoncé largement perdant face à EM, peut-il et doit-il avoir une place dans cette recomposition ?
Le problème n’est pas de reconstruire en voulant à tout prix et avant tout recomposer des partis existants ou agréger des leaders. C’est la conviction, la force du projet qui doivent rassembler demain, davantage que la volonté de combiner. Un espace politique est béant dans la France d’aujourd’hui : c’est celui qui allait autrefois de Philippe de Villiers et Charles Pasqua à Philippe Seguin. L’organisation de cet espace doit être mise en œuvre au plus tôt, en tirant tous les enseignements de l’état de la France et de l’Europe d’aujourd’hui. Mais aussi en tirant les leçons des scrutins de dimanche dernier, qui ont montré une faillite certaine des partis politiques, en tous cas dans leurs formes et leurs pratiques actuelles.
Le problème n’est pas de reconstruire en voulant à tout prix et avant tout recomposer des partis existants ou agréger des leaders. C’est la conviction, la force du projet qui doivent rassembler demain, davantage que la volonté de combiner. Un espace politique est béant dans la France d’aujourd’hui : c’est celui qui allait autrefois de Philippe de Villiers et Charles Pasqua à Philippe Seguin. L’organisation de cet espace doit être mise en œuvre au plus tôt, en tirant tous les enseignements de l’état de la France et de l’Europe d’aujourd’hui. Mais aussi en tirant les leçons des scrutins de dimanche dernier, qui ont montré une faillite certaine des partis politiques, en tous cas dans leurs formes et leurs pratiques actuelles.
Cette formation doit rassembler les personnes qui sont attachées aux valeurs conservatrices sur le plan social, à une économie de partage, de dialogue social et de justice, à la liberté et l'initiative personnelle et à une France souveraine dans une Union européenne refondée. Ce sont les choses sur lesquelles était fondées ma candidature aux élections primaires. Cet espace politique existe. Je m'engage à prendre ma part de responsabilité dans l’émergence et la naissance de cette offre politique d’une droite refondée.
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