lundi 5 juin 2017

Terrorisme intérieur : une des modalités de combat de Daech

L’attentat du Manchester Arena, perpétré par un Britannique de 22 ans né de parents libyens, est effrayant à plus d’un titre. D’abord, par le nombre et la nature des victimes. 22 morts, dont une petite fille de 8 ans. Et 64 blessés qui, pour certains, sont toujours dans un état grave. Ensuite, parce que l’endroit choisi par celui qui avait décidé de se faire exploser dans la foule est symbolique d’une valeur phare et surprotégée de nos sociétés occidentales : la jeunesse. Enfin, parce que l’âge même du kamikaze, à peine plus de 20 ans, était proche de celui de ses victimes. Autant d’éléments qui rendent incompréhensible un acte d’une rare barbarie, dans un pays qui, jusqu’à présent, était considéré comme un exemple en matière d’intégration.
Ce terrorisme, « de plus en plus intérieur » selon Béatrice Brugère, ex-juge antiterroriste, serait, toujours selon la magistrate, une pure émanation de nos territoires. Et, de fait, parmi les auteurs des attentats, qu’il s’agisse des frères Kouachi, nés à Paris, ou de Mohammed Merah, né à Toulouse, ils sont nombreux à avoir grandi dans des pays qui avaient accueilli leurs parents, et reçu une éducation qui en faisait des citoyens au même titre que les autres. Le cas du terroriste britannique n’est pas différent. Né en Grande-Bretagne, il a vécu dans ce pays, apparemment sans problème, jusqu’à ce que cette folie meurtrière fasse de lui un monstre porté par une idéologie qui, peu à peu, gagne une jeunesse vulnérable et en perdition.
Car, nous l’avons déjà dit, ces jeunes qui, du jour au lendemain, basculent dans l’islamisme radical viennent de tous les milieux. En profonde rupture avec les convictions religieuses et morales de leurs parents, qu’ils accusent parfois d’être des traîtres à l’islam, ils cherchent de nouveaux repères éthiques pour leur vie quotidienne. Ainsi, sous la pression très efficace de la propagande de Daech, ils se convertissent ou reviennent à une religion qu’ils ne connaissent pas, mais sur laquelle ils comptent pour leur redonner des repères stables et, surtout, pour donner un nouveau sens à leur vie.
Pour en revenir à la notion de terrorisme intérieur ou extérieur, elle ne fait pas partie de la vision stratégique de l’État islamique. Pour le califat, le terrorisme est un mode d’expression. Il exprime un droit de possession et de reconquête. Assassiner à Paris, à Londres ou à Manchester est une manière d’affirmer que ces territoires appartiennent déjà au califat. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle l’État islamique renomme les combattants qui rejoignent ses rangs, en accolant à leur nouveau nom islamique leur lieu d’origine. Rappelons-nous le cas de Romain Letellier, devenu Abou Seyad al-Normandy, de Normandie, ou de Maxime Hauchard, de France.
Ainsi, si de nombreux terroristes sont natifs des pays qui les ont accueillis, cette situation n’a pas de valeur symbolique pour Daech. Elle procède simplement des modalités d’un combat qui doit être porté partout, par n’importe quel moyen et par n’importe qui, pourvu qu’il ait fait allégeance au califat. Cette situation devrait inciter les pays occidentaux à reconsidérer leurs politiques de lutte contre le terrorisme islamiste. D’abord, en revoyant leurs politiques migratoires. Ensuite, en refondant, selon le cas, leur conception de l’intégration ou de l’assimilation. Enfin, en prenant des mesures drastiques contre toutes les formes de radicalisation. Le terrorisme prôné et conduit par l’État islamique n’est pas un banal phénomène de société qui pourra être combattu avec des méthodes classiques. Il doit faire l’objet d’une approche globale au sein de laquelle la détermination et la fermeté devront remplacer un angélisme bien trop souvent présent.

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